Le partenaire principal de Malem-Auder dans ce projet est le service technique départemental de l’éducation dénommé Inspection de l’Éducation et de la Formation (IEF)

C’est une structure déconcentrée du ministère de l’Éducation nationale qui joue un rôle essentiel dans la gestion et l’amélioration de la qualité de l’éducation.

Ses missions sont la gestion de la carte scolaire, l supervision et le contrôle et l’encadrement pédagogique ; la formation continuée des enseignants ; l’appui aux établissements scolaires et la collecte et l’analyse des données statistiques.

L’IEF a en charge notamment les établissements préscolaires, les écoles fondamentales ainsi que les Centres d’Enseignement Moyen. Parfois, lorsque les Inspections académiques régionales font défaut, l’IEF gère également les lycées ruraux.

Au niveau national, le programme PAPSE[1] (Projet d’Amélioration des Performances du Système Éducatif) a pour objectif d’améliorer la qualité, l’équité et l’accès dans le secteur de l’éducation notamment en luttant contre les inégalités et les disparités spatiales et sociodémographiques persistantes, y compris celles liées au genre. Comme souvent, l’État prône une politique qu’il a des difficultés à mettre en œuvre, d’où la recherche de partenaires.

Janvier 2025 : rencontre informelle en fin de journée scolaire avec un groupe de 20 à 25 jeunes de 13 à 17 ans. Beaucoup de jeunes filles et quelques garçons. CEM de Niahène. Une surveillante générale est présente.

« Comment-se fait-il que les toilettes de filles et des garçons ne soient pas séparées ? »

« Ma sœur a dû quitter l’école à cause d’une grossesse non-désirée. »

« Pourquoi, à la fin de la journée, mon frère peut-il aller jouer au foot alors que moi, Djamila, je dois d’abord effectuer une série de tâches ménagères ? »

« Une de mes amies a quitté l’école en 5ème car sa famille l’a mariée avec un voisin de 40 ans. »

« Au moment de mes règles, je dois rester à la maison car je n’ai pas la possibilité d’avoir des serviettes hygiéniques. »

« À la maison, les parents de mon amie ont préféré mettre leur fils à l’école…. Elle reste à la maison pour aider la maman. »

« Il n’y a pas de cours ni d’information à propos de la contraception. »

Afin de préparer la rédaction du présent projet, Ramatoulaye Ndao, coordinatrice de Malem-Auder Sénégal et responsable genre auprès de l’Inspection pour l’Éducation et la Formation, avait tenu à organiser cette rencontre qui sera répétée dans un autre CEM, celui de Sagna.

Le décor est planté…

Contexte

Au Sénégal, le statut de la femme est un sujet complexe et en constante évolution. Bien que des progrès significatifs aient été réalisés en matière de droits des femmes, des défis persistent.

Statut Social et Juridique :

Traditionnellement, les femmes sénégalaises ont un statut social façonné par les coutumes et les religions locales. Cependant, la Constitution du Sénégal garantit l’égalité des droits entre hommes et femmes. Des lois ont été adoptées pour lutter contre les discriminations et les violences faites aux femmes. La situation reste très différente dans les grandes villes ou dans les campagnes

Éducation et Emploi :

L’accès à l’éducation pour les filles s’est amélioré, mais des disparités persistent, surtout en milieu rural. Les femmes sont de plus en plus présentes sur le marché du travail, notamment dans l’agriculture, le commerce et l’artisanat. Cependant, elles sont souvent concentrées dans des emplois peu rémunérés et précaires.

Participation Politique :

Les femmes sont de plus en plus actives en politique (même à des postes importants), mais leur représentation reste faible.

Défis et Perspectives :

Malgré les progrès, des défis persistent, tels que les violences basées sur le genre, les mariages précoces et les mutilations génitales féminines. Des organisations de la société civile se mobilisent pour défendre les droits des femmes et promouvoir leur autonomisation.

Dans les écoles, cette situation générale est marquée de manière forte, surtout à partir de l’enseignement secondaire moyen, particulièrement en zone rurale.

Projet

Le projet présenté a été élaboré en commun par l’IEF et les responsables sénégalais de Malem-Auder. Il vise à mettre en place et à organiser dans les Collèges d’Enseignement Moyen (CEM) du département de Malem-Hodar des « Cellules genre ».

Une cellule genre est une organisation spécifique qui exige l’élection d’un Bureau (Président-Secrétaire-Trésorier) dont la gestion relève des élèves. La structure est encadrée par un enseignant préalablement formé à la problématique du genre.

Les cellules genre dans les CEM (et les lycées) ont pour mission principale de promouvoir l’équité et l’égalité entre les genres dans le milieu scolaire et familial. Elles travaillent à éliminer les discriminations et les stéréotypes liés au genre et à créer un environnement d’apprentissage inclusif et respectueux pour tous les élèves, filles et garçons.

Les membres de la cellule genre sont formés par leur enseignant encadreur et jouent un rôle de sensibilisation dans la communauté scolaire comme dans leur environnement familial ou social.

Logiquement, ces membres avancent dans leur scolarité et quittent donc l’établissement scolaire au bout de 3 ans. D’autre part la mobilité scolaire des enseignants fait aussi en sorte que ces cellules doivent être régulièrement réorganisées

Le projet vise essentiellement des objectifs de formation, d’accompagnement et de sensibilisation.

Objectifs

Parmi les Objectifs du Millénaire pour le Développement, ce projet vise essentiellement le point « Promouvoir l’égalité et l’autonomisation des femmes. »

Concrètement, le projet vise à :

Objectif spécifique 1 : Mettre en place et renforcer des cellules genre dans les établissements scolaires cibles

Activité prévue 1 : Une visite préparatoire a lieu dans chaque CEM cible pour rencontrer le Principal et l’équipe pédagogique afin de déterminer localement les possibilités de création d’une cellule genre. Un enseignant référent est proposé par le Principal. La tâche de l’enseignant sera, dans un premier temps, de mobiliser un groupe d’élèves, garçons et filles, afin de créer la structure.

Activité prévue 2 : Une seconde visite de travail est prévue dans un délai rapproché afin de procéder à l’élection du Bureau de la Cellule et à l’organisation de la première réunion de travail.

Résultat attendu : Chaque CEM cible possède sa cellule genre fonctionnelle et active. Le rythme des réunions est hebdomadaire et un rapport mensuel d’activité est envoyé à l’IEF.

Objectif spécifique 2 : Renforcer la capacité des membres des cellules genre et des encadreurs à propos des inégalités, discriminations et violences basées sur le genre.

Activité prévue : Deux sessions de formation de 2 journées sont organisées par l’Inspection pour l’Éducation et la Formation. Chaque CEM cible libère un membre du Bureau de la cellule et l’encadreur. Le programme prévoit deux ateliers de formation sur les disparités de genre en milieu scolaire : quelles stratégies pour une meilleure prise en charge des filles à l’école ?

Résultat attendu : 2 personnes dans chaque CEM sont à même de démultiplier les informations reçues auprès des membres.
Les membres de la cellule sont mieux outillés pour réagir aux diverses situations de discriminations existant dans le cadre scolaire et familial.

Objectif spécifique 3 : Sensibiliser la communauté à propos des inégalités, discriminations et violences basées sur le genre en insistant sur la nécessité d’une bonne scolarisation des filles et sur le respect de leurs droits.

À noter que cette sensibilisation vise 3 publics différents :

  • la conférence (ou causerie au Sénégal) atteint un public varié d’une trentaine de personnes ;
  • la sensibilisation se fait à l’échelle d’une commune ou d’un village, par le biais de prises de parole et/ou d’activités culturelles (théâtre, sketch, chants, mise en situation, interpellation du public…) ;
  • Le plaidoyer concerne un public très restreint composé de diverses autorités locales, départementales, sociales ou religieuses. Il s’agit d’élaborer toutes les stratégies d’influence (notamment lobbying et mobilisation citoyenne) permettant de défendre une cause.

Activité prévue 1 : Une conférence est organisée dans chaque CEM cible. Le public est constitué d’une trentaine de personnes (équipe administrative, professeurs, élèves). Deux animateurs-conférenciers, membres de l’IEF ou de l’Inspection académique régionale abordent la question du genre sous l’angle de la scolarisation des filles.

Activité prévue 2 : Un plaidoyer est organisé dans chaque village comprenant un des CEM cible. Le thème des rencontres est de lutter contre les mariages précoces en rappelant les dispositifs légaux et les autorités ou personnes-ressources à même d’apporter des solutions aux cas dont les cellules genre auraient connaissance.

Activité prévue 3 : Un Forum départemental de sensibilisation est organisé à Malem-Hodar, chef-lieu du département, à l’occasion de la fin de l’année scolaire. Une délégation de chaque cellule est présente. Diverses activités ayant le genre et les discriminations qui y sont liées sont organisées au Lycée de Malem-Hodar. Le thème central de la journée est celui du droit des filles et de la femme. Une assistance d’environ 70 personnes est visée. Résultat attendu : Au niveau départemental, la sensibilisation permet de diminuer les cas de discriminations liées au genre grâce à un réseau de ressources mises en lumière lors des activités prévues.

Risques

Les autorités académiques et le ministère de l’Éducation nationale du Sénégal ont fait de la lutte contre les discriminations scolaires liées au genre un point important de leur programme. Le présent projet est considéré très positivement par l’Inspection pour l’Éducation et la Formation du département de Malem-Hodar qui y voit une opportunité de pouvoir appliquer les directives du PAPSE dans ce département particulièrement défavorisé. Il n’y a donc pas de risque prévisible à ce niveau. Par contre, dans certains villages, il est possible que des notables sociaux ou religieux voient d’un mauvais œil ce type d’activité. Cette éventuelle opposition est prise en compte dans l’objectif « Sensibiliser » par l’activité « Plaidoyer ».

Budget

Le budget total prévu est de 11.010 € dont près de 40 % sont pris en charge par l’Inspection pour l’Éducation et la Formation.

Le détail des postes budgétaires est le suivant :

Afin de préparer ce projet diverses visites ont eu lieu dans des écoles secondaires.

Voici quelques photos de ces visites.


[1] Voir : https://www.education.sn/publications/papse (consulté le 16/02/25)